Société coquille vs Prête-Nom vs mSPV: Structurez-vous votre croissance ou de futurs ennuis?
Si vous vous développez à l’international ou vous préparez à des transactions transfrontalières complexes, le choix de la structure juridique appropriée n’est pas seulement une décision technique, mais une question de protection à long terme, de réputation et de sécurité opérationnelle.
Dans un monde où la transparence financière et l’application des réglementations sont devenues la norme mondiale, la prudence n’est plus une option. Elle est essentielle.
Pendant plusieures années, les entreprises à la recherche d’efficacité fiscale, d’anonymat, de protection d’actifs et de discrétion stratégique se sont appuyées sur des outils tels que les sociétés écrans, les accords de prête-nom et, plus récemment, les structures juridique dédiées sous gestion (mSPV). À une certaine époque, toutes les formes juridiques offraient des solutions pratiques et souvent efficaces. Les sociétés écrans offraient flexibilité et divulgation minimale. Les accords de prête-nom offraient confidentialité et assistance en matière de conformité locale. Mais cette époque est révolue. Les réglementations mondiales ont fondamentalement changé les règles. Les sociétés coquilles, sans substance réelle, sont aujourd’hui les principales cibles d’enquêtes. Les structures de prête-nom, autrefois utilisées pour dissimuler la propriété, sont devenues des symboles d’opacité et d’évasion fiscale. Aujourd’hui, ces outils n’assurent plus la protection, ils sont synonymes de risque.
Si tous les outils de structuration n’ont pas perdu leur pertinence, certains peuvent aujourd’hui causer davantage de problèmes que d’avantages. L’enjeu n’est plus de déterminer quelle structure offre la meilleure confidentialité ou rapidité, mais celle qui garantit conformité, bancabilité (crédibilité auprès des banques) et efficacité opérationnelle.
Examinons de plus près les sociétés coquilles, les structures de prête-nom et les mSPV (sociétés à usage particulier sous gestion en Français) afin de comprendre lesquelles fonctionnent encore et lesquelles devraient être abandonnées.
Sociétés coquilles : Jadis Utiles, Désormais à Risque
À première vue, une société écran peut sembler être une option judicieuse. Facile à constituer, peu coûteuse à entretenir et offrant une visibilité réduite. Pas de personnel, pas de bureau, pas d’activités, uniquement une coquille juridique propre permettant de détenir des actifs, de placer des capitaux ou de faciliter une transaction. En apparence, tout paraît efficace, n’est-ce pas ?
Pendant des années, des entrepreneurs prudents et des investisseurs internationaux ont recouru aux sociétés coquilles pour des raisons parfaitement légitimes: isoler un risque, structurer des investissements transfrontaliers, détenir des droits de propriété intellectuelle ou tester de nouveaux marchés avant de s’y engager pleinement. Les sociétés coquilles constituaient un outil pratique pour ceux qui recherchaient flexibilité et confidentialité sans supporter le poids d’une structure opérationnelle complète. Mais cette époque est révolue.
Aujourd’hui, une société écran ne signifie plus « structuration stratégique » : elle constitue un signal d’alerte. Les régulateurs internationaux ont ouvert la chasse aux entités dépourvues de substance, et les règles ne sont plus floues mais implacables. Les règles BEPS de l’OCDE suppriment les avantages fiscaux des structures qui ne démontrent pas d’activité locale. Les directives ATAD de l’UE et le futur règlement « DAC6 » vont encore plus loin, en visant toute entité « boîte aux lettres » dépourvue de salariés ou de présence physique. Aux États-Unis, le Corporate Transparency Act impose une divulgation complète des bénéficiaires effectifs, rendant quasiment impossible toute stratégie de confidentialité traditionnelle. Ajoutez à cela les réglementations bancaires internationales telles que le CRS et les normes du GAFI, et le constat est clair : si votre structure ressemble à une société écran, elle ne sera plus tolérée.
Structures de Prête-Nom : D’un Outil de Confidentialité à un Risque de Conformité
Les structures de prête-nom pouvaient autrefois sembler être une astuce ingénieuse. Besoin d’un administrateur local ou de rester discret ? Il suffisait de nommer un prête-nom. Sur le papier, vous étiez protégé, conforme, invisible. Du moins en apparence.
Une structure de prête-nom consiste à désigner une personne de confiance comme propriétaire officiel ou administrateur de votre société, tandis que le contrôle réel demeure entre vos mains. Pendant un certain temps, cette pratique était courante, notamment dans les juridictions exigeant une représentation locale ou lorsque les fondateurs préféraient ne pas voir leur nom figurer dans les registres publics.
Mais les régulateurs ont rapidement réagi. Aujourd’hui, au-delà des difficultés bancaires déjà évoquées, auxquelles on s’expose également avec une société écran, il existe une multitude d’autres écueils juridiques. À la suite des scandales des Panama Papers et des Paradise Papers, les montages de prête-nom sont devenus un symbole mondial de secret financier et d’abus. Depuis lors, les cadres juridiques se sont considérablement durcis. Les 5e et 6e directives européennes de lutte contre le blanchiment de capitaux imposent désormais la divulgation intégrale des bénéficiaires effectifs dans des registres publics. Au Royaume-Uni, le régime relatif aux Persons with Significant Control (PSC) érige en infraction pénale l’omission de déclarer l’identité des véritables contrôleurs d’une société. Aux États-Unis, le Corporate Transparency Act impose des obligations similaires par le biais de déclarations obligatoires auprès du FinCEN.
Même lorsqu’elles sont utilisées légalement, les structures de prête-nom comportent un risque intrinsèque. Elles reposent souvent sur des accords informels ou une confiance tacite envers les administrateurs désignés — jusqu’à ce qu’un litige survienne. En réalité, désigner un prête-nom équivaut à lui confier le contrôle formel de la société, et sur le papier, il peut en disposer à sa guise. Aux yeux des régulateurs, des banques et des autorités fiscales, le prête-nom est le décideur officiel. Ainsi, si celui-ci devient récalcitrant ou si la relation se détériore, la reprise de contrôle peut se transformer en véritable cauchemar juridique.